29 juin 2018

Le Cinéma musical de Brian De Palma II. 1976-1980

Carrie (au bal du diable), 1976
Une des plus franches réussites de Brian De Palma, qui impose le nom du cinéaste comme nouveau maître du fantastique, chouchou du festival d'Avoriaz. Illuminé par l'interprétation impressionnante d'une Sissy Spacek qui se livre corps et âme, le film propose une belle, touchante et terrifiante recréation fantasmatique du monde de l'adolescence, au sein d'une petite ville de province comme les affectionne tant Stephen King. Le succès du film auréola d'ailleurs aussi le romancier, qui voyait enfin sa carrière décoller.

Le film scelle également la rencontre entre De Palma et le compositeur italien Pino Donaggio, qui réalisait là un véritable coup de maître avec son approche très personnelle de la musique de film d'horreur. Et ce, dès l'inoubliable générique d'ouverture qui impose une atmosphère d'une délicatesse proprement poignante : 





The Fury (Furie), 1978 
Génial et fou. À partir d'un scénario prenant et assez imprévisible, De Palma réalise un film incroyablement brillant, plein à craquer de ses thèmes de prédilection. Comme souvent, ses personnages se retrouvent dans la peau de spectateurs impuissants d'un drame, toute la question étant de savoir si ce qu'ils ont vu ne relève pas d'une mise en scène. Pour le public de l'autre côté de l'écran, c'est un régal de se faire pareillement manipuler. Les morceaux d'anthologie se succèdent, toujours filmés de manière originale et sans paresse. Typiquement le genre de film dont la vision en salle aurait des chances d'être gâchée par les rires gras de certains spectateurs face à l'outrance de certaines scènes. Le passage le plus puissant étant peut-être celui de la fuite d'Amy Irving au ralenti, magistralement élaborée comme une mécanique où le moindre élément fait sens. La jeune actrice se donne à fond et compose un personnage à fleur de peau vraiment émouvant. Kirk Douglas est toujours aussi fringuant et assure avec talent le rôle d'un père déterminé, capable à l'occasion de craquer (la scène du bus). Cassavetes en méchant est aussi étonnant que convaincant. On s'amusera aussi à repérer des débutants comme Darryl Hannah ou Dennis Franz

Les quelques scènes du début qui montrent Irving au collège semblent vraiment faire du pied sous la table à Carrie. Les deux films mettent en scène télékinésie et pouvoirs psychiques, aussi la critique et les spectateurs purent rapidement considérer The Fury comme une redite sans prise de risque, ce qui renforce encore plus cette impression de « De Palma's digest. » C'est pourtant encore un sujet neuf, enrichi qui plus est par une dimension espionnage qui rend le film franchement haletant. On est encore quelques années avant que Cronenberg s'en réempare pour son Scanners, puis ce seront les enfants mutants d'Akira et bientôt ceux de Stranger thingsEffets spéciaux de maquillage bien gores de Rick Baker particulièrement saisissants. Quant à la musique, le film bénéficie du talent de John Williams qui compose en particulier un Main theme tout simplement somptueux. On regrette alors d'autant plus que le compositeur n'ait pas eu d'autre occasion de travailler avec le réalisateur (trop cher, peut-être ?) :






Home movies, 1979
L'un des films les plus confidentiels du cinéaste, sans doute vécu comme un retour salutaire au cinéma underground de ses débuts. Home movies fut en effet tourné en toute liberté dans le cadre d'un cours donné par le réalisateur, avec ses étudiants et les participations amicales d'amis acteurs : Kirk Douglas, Gerrit  Graham, Nancy Allen et Keith Gordon

Je n'ai toujours pas eu l'occasion de le voir, mais son synopsis suggère une œuvre assez personnelle, avec un nouveau personnage de cinéaste voyeur et cette idée du cinéma-mensonge. Sans attente commerciale, le réalisateur se fait plaisir, et s'offre même le luxe d'une partition de Donaggio, qui lui aussi fait preuve de zèle avec un Main theme jubilatoire :









Dressed to kill (Pulsions), 1980
Si le spectateur est un pervers, De Palma s'avère ici l'être au même titre. L'influence d'Hitchcock ne se cache plus, Psycho et Vertigo dans le rétro, mâtinée de giallo pour la violence graphique et l'improbabilité de l'intrigue. Ici l'effet et le suspense priment sur la vraisemblance, et le mauvais goût n'est jamais bien loin mais assumé avec fraîcheur. Comme sur The Fury, la conclusion est là aussi décevante, pas à la hauteur des promesses de la première moitié, mais reste un fascinant travail de metteur en scène. 

Le film voit se succéder de longues séquences de pure extase cinématographique, sans dialogue. Tout passe par l'image et le mouvement, et la musique se doit de fusionner. De Palma et Donaggio ne se quittent plus, et c'est une nouvelle démonstration de symbiose pour cet étrange film œuvre d'art :



DOSSIER BRIAN DE PALMA :

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