Francis Ford Coppola est un des cinéastes pour lesquels j’éprouve le plus de respect, auteur de génie dont les œuvres m’impressionnent toujours quelque soit le nombre de visionnages. Croisé l'homme une fois dans le Quartier latin, l’année où il présidait Cannes, sans oser l’approcher, bavant de loin. J'aime la fidélité de ses collaborateurs (Dean Tavoularis, Robert Duvall, Tom Waits), sa façon de mêler les affaires et la famille (Carmine, Eleanor, Talia, Sofia, Roman). Assoiffé d'indépendance, l'artiste s'est très tôt rêvé mogul, fondant son propre studio American Zoetrope, et j’ai une tendresse particulière pour ces années 80, qui furent pour lui un cauchemar financier et pendant lesquelles il a été incroyablement loin dans l’expérimentation d’une nouvelle forme de narration, libre, poétique et jouant consciemment avec les artifices du spectacle. Pour ces raisons, One from the heart est un film qui m'avait subjugué à sa découverte, sorte de mariage improbable entre le cinéma de Fellini et celui du Nouvel Hollywood.
Par son ambition et sa conception, le film représente à la fois un sommet et un point de non-retour, l'équivalent de ce que furent 1941 pour Spielberg, ou Heaven's gate pour Cimino, superproductions réalisées sans bride sur le cou et qui furent des désastres autant critiques que publics. Donnant son sens entier à l'expression "magie du cinéma", dans une démarche presque expérimentale qui se permet de rendre visibles les mécanismes de l'illusion, Coppola en appelle à la complicité du spectateur. Les scènes sont superbement éclairées et pleines de trouvailles qui réjouissent les sens.
Mais l'esthétique et la technique ont beau se placer au premier plan, le réalisateur ne sacrifie par pour autant la direction d'acteurs. Le film raconte une belle histoire de couple traitée avec autant de fantaisie que d’émotion, et l'on suit ces deux êtres dans une narration qui semble parfois assez proche du temps du rêve, fait de digressions et d'impasses. Façon de renouer avec la tradition hollywoodienne, le cinéaste s'offre également ici un retour à la comédie musicale, genre qu'il avait approché à ses tous débuts (Finian's rainbow en 1968). Les chansons de Tom Waits sont non seulement de très haut niveau, mais on a aussi droit à de formidables numéros musicaux, notamment une mémorable séquence de tango entre Teri Garr et Raul Julia finissant dans la rue. Drôle, risqué et finalement émouvant, One from the heart est un conte de fée comme plus personne aujourd'hui n'oserait en tourner. C'est d'ailleurs assez triste de voir le rideau de fin se fermer sur la mention « tourné entièrement dans les Studios Zoetrope », telle une publicité faite pour le studio, alors qu'il allait mettre immédiatement la clé sous la porte ! Chef-d'œuvre de fou.
Par son ambition et sa conception, le film représente à la fois un sommet et un point de non-retour, l'équivalent de ce que furent 1941 pour Spielberg, ou Heaven's gate pour Cimino, superproductions réalisées sans bride sur le cou et qui furent des désastres autant critiques que publics. Donnant son sens entier à l'expression "magie du cinéma", dans une démarche presque expérimentale qui se permet de rendre visibles les mécanismes de l'illusion, Coppola en appelle à la complicité du spectateur. Les scènes sont superbement éclairées et pleines de trouvailles qui réjouissent les sens.
Mais l'esthétique et la technique ont beau se placer au premier plan, le réalisateur ne sacrifie par pour autant la direction d'acteurs. Le film raconte une belle histoire de couple traitée avec autant de fantaisie que d’émotion, et l'on suit ces deux êtres dans une narration qui semble parfois assez proche du temps du rêve, fait de digressions et d'impasses. Façon de renouer avec la tradition hollywoodienne, le cinéaste s'offre également ici un retour à la comédie musicale, genre qu'il avait approché à ses tous débuts (Finian's rainbow en 1968). Les chansons de Tom Waits sont non seulement de très haut niveau, mais on a aussi droit à de formidables numéros musicaux, notamment une mémorable séquence de tango entre Teri Garr et Raul Julia finissant dans la rue. Drôle, risqué et finalement émouvant, One from the heart est un conte de fée comme plus personne aujourd'hui n'oserait en tourner. C'est d'ailleurs assez triste de voir le rideau de fin se fermer sur la mention « tourné entièrement dans les Studios Zoetrope », telle une publicité faite pour le studio, alors qu'il allait mettre immédiatement la clé sous la porte ! Chef-d'œuvre de fou.
The Outsiders, 1983
Découvert le film dans son nouveau montage dit "The Complete novel", proposé par Coppola en 2005. Le résultat me laisse encore plus inconsolable de l'essoufflement du talent du cinéaste à ce jour, ou en tous cas de ses moyens de tourner. Parce que ça c'est du cinéma ! De la première à la dernière image, The Outsiders n'est que beauté et poésie. Se présentant d'entrée comme un récit subjectif, il délivre une série de visions qui ne se soucient à aucun moment d'esquisser une quelconque peinture sociale et réaliste d'une époque révolue. Des dialogues au comportement des personnages, tout est ici empreint de l'esprit du jeune narrateur, de sa sensibilité à fleur de peau, de ses références poétiques (Robert Frost) et cinématographiques (Paul Newman). On cherchera en vain le pittoresque de ces films de blousons noirs vus ailleurs.
Ici, on a d'authentiques lost boys qui étouffent sous leurs angoisses, écrasés par le sentiment d'un destin sans lumière. Ils sont certes contraints de jouer les gros durs et de se chambrer, mais malgré leur marginalité on devine qu'ils respectent un code qui compte pour eux, et surtout ils ne dissimulent par leurs larmes. J'ai beaucoup aimé le traitement émouvant et subtil réservé aux deux grandes figures paternelles du film, incarnées par Swayze et Dillon, avec une bienveillance constante dans le regard pas loin d'être bouleversante.
Après Outsiders, Diane Lane et Dillon retrouveront Coppola sur son sublime Rumble fish. Ces deux films que le réalisateur a tourné dans la foulée sont tous deux des adaptations de la jeune romancière S.E. Hinton (qui coscénarisa le second). Il est évidemment inévitable de les voir sans les mettre en balance. Mais ce serait vraiment dommage d'avoir à choisir, ou d'estimer que l'un doit obligatoirement éclipser l'autre. Moins immédiat, plus fragile, The Outsiders est loin de démériter. La photo et la composition des plans sont à tomber. On devine les références picturales au Technicolor de La Fureur de vivre et d'Autant en emporte le vent en particulier, avec ces silhouettes en ombres chinoises découpées sur un horizon flamboyant. Corrigée en 2005 avec des instrumentaux rockabilly, la bande son créent cependant un décalage que je n'ai pas toujours trouvé très heureux, allant un peu à l'encontre de l'aspect dramatique de certaines scènes. Mais ça participe peut-être de cette volonté d'appuyer l'impression de rêve. Et à ce sujet, j'ai vraiment beaucoup aimé la chanson d'ouverture, ce Stay gold chanté par Stevie Wonder qui donne d'entrée une couleur pleine de nostalgie et de mélancolie :
Ici, on a d'authentiques lost boys qui étouffent sous leurs angoisses, écrasés par le sentiment d'un destin sans lumière. Ils sont certes contraints de jouer les gros durs et de se chambrer, mais malgré leur marginalité on devine qu'ils respectent un code qui compte pour eux, et surtout ils ne dissimulent par leurs larmes. J'ai beaucoup aimé le traitement émouvant et subtil réservé aux deux grandes figures paternelles du film, incarnées par Swayze et Dillon, avec une bienveillance constante dans le regard pas loin d'être bouleversante.
Après Outsiders, Diane Lane et Dillon retrouveront Coppola sur son sublime Rumble fish. Ces deux films que le réalisateur a tourné dans la foulée sont tous deux des adaptations de la jeune romancière S.E. Hinton (qui coscénarisa le second). Il est évidemment inévitable de les voir sans les mettre en balance. Mais ce serait vraiment dommage d'avoir à choisir, ou d'estimer que l'un doit obligatoirement éclipser l'autre. Moins immédiat, plus fragile, The Outsiders est loin de démériter. La photo et la composition des plans sont à tomber. On devine les références picturales au Technicolor de La Fureur de vivre et d'Autant en emporte le vent en particulier, avec ces silhouettes en ombres chinoises découpées sur un horizon flamboyant. Corrigée en 2005 avec des instrumentaux rockabilly, la bande son créent cependant un décalage que je n'ai pas toujours trouvé très heureux, allant un peu à l'encontre de l'aspect dramatique de certaines scènes. Mais ça participe peut-être de cette volonté d'appuyer l'impression de rêve. Et à ce sujet, j'ai vraiment beaucoup aimé la chanson d'ouverture, ce Stay gold chanté par Stevie Wonder qui donne d'entrée une couleur pleine de nostalgie et de mélancolie :
DOSSIER FRANCIS FORD COPPOLA :
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