3 octobre 2018

Le Cinéma musical de Brian De Palma VI. 1996-1998

Mission : impossible, 1996
De Palma avait en quelque sorte ouvert le ban dès 1987 avec son époustouflante transposition des Incorruptibles. Mais c'est surtout en ce milieu des années 90 qu'Hollywood se met à intensément exploiter le filon des séries TV, pour le meilleur (Le Fugitif, Maverick, Charlie's angels), comme pour le pire (Chapeau melon et bottes de cuir, Le SaintWild Wild West). Blockbuster calibré, ce Mission : impossible a beau relever de l'œuvre de commande, ce qu'en fait De Palma est passionnant et intelligent. Cosigné par les talentueux David Koepp et Steve Zaillian — appelé en renfort Robert Towne n'aurait pas vu grand chose de son travail retenu — le scénario trouve le moyen de parfaitement correspondre aux obsessions creusées de film en film par le cinéaste. On se demande soudainement pourquoi il n'a pas fait davantage de films d'espionnage, le genre étant propice aux ambiances de paranoïa et de manipulation par le pouvoir des images.

Après une magistrale ouverture qui pose d'emblée la question du masque et du simulacre, De Palma nous offre une première mission pensée pour mettre à mal le concept-même de la série, fondée sur le travail d'équipe. On assiste stupéfait à un cruel jeu de massacre, où les personnages sont brutalement réduits à n'être que des pions. Le film n'est par la suite qu'un enchaînement de morceaux de bravoure, chaque scène offrant un dispositif à suspense différent. Énorme choc au moment de sa découverte, par ses excès, le climax à bord de l'Eurostar reste pour moi une des plus grandes scènes d'action du cinéma américain de cette décennie.

Le film fit un triomphe. Sans le savoir, De Palma démarrait là une franchise ambitieuse, exigeante, qui allait devenir une référence dans son domaine, carte de visite du nouveau Tom Cruise producteur comblé ET maître cascadeur. La bande originale est confiée à Danny Elfman, qui relève haut la main le défi dans le registre du suspense hitchcockien. C'est cependant ce morceau au tempo bien mesuré que j'apprécie particulièrement :






Snake eyes, 1998
Après L'Impasse et Mission : impossible, De Palma prolonge sa collaboration avec David Koepp. On n'est cependant plus sur le même niveau d'ambition. Le scénario moins profond se veut plus ludique, prétexte à un véritable exercice de style où le réalisateur fait preuve d'une éblouissante maîtrise technique. Nouvelle variation sur le voyeurisme et l'image-mensonge, avec la tension apportée par une intrigue en temps réel et l'imminence d'une catastrophe climatique.

La trahison ne sera cependant pas seulement celle des images, et le film réussit presque à émouvoir lors du face à face final où surgit toute la dimension tragique et pathétique du personnage interprété avec fièvre par Nic Cage, flic ouvertement ripou et exploité précisément pour ses faiblesses. Comme le prouve ici l'écriture de son nom sur l'affiche aussi gros que le titre, c'était encore la période de gloire de l'acteur tout juste oscarisé, tête d'affiche de blockbusters et de films de catégorie A, demandé par les plus grands (Schroeder, Scorsese, Woo, Scott, Jonze). Pour la bande originale, De Palma se montre une nouvelle fois aussi exigeant qu'avisé, et fait appel à Ryuichi Sakamoto. Le compositeur semble ici puiser à la même source qui lui inspira ses somptueux scores pour Bertolucci, et signe pour ce film noir un thème romantique et lyrique qui apporte une profondeur au film que l'on n'attendait pas, contribuant à l'élever au-dessus de la simple et superficielle course poursuite :



DOSSIER BRIAN DE PALMA :

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