10 juillet 2018

Le Cinéma de F.F. Coppola V. 1988-1992

Tucker, 1988
Film irrémédiablement associé à mes premières vraies découvertes cinéphiles. Je me délecte de son histoire édifiante, de l’ambiance familiale retranscrite, de l’état d’esprit d’atelier, de l’humanisme de ses personnages, notamment celui de Martin Landau, remarquablement écrit. Dans le rôle-titre, Jeff Bridges incarne à merveille l'ingénu(os)ité et l'enthousiasme du rêveur américain.

La narration est exemplaire. Tucker tient à la fois du biopic, de la success story et du film de procès, avec une patine très classique hollywoodien. Offrant une reconstitution impeccable baignée dans la lumière chaleureuse de Vittorio Storaro, Coppola surfe sur touts ces genres avec une maîtrise totale de ses moyens. Il faudra attendre The Aviator de Scorsese pour retrouver un traitement équivalent, approché avec autant de passion (Howard Hughes apparaît d'ailleurs dans Tucker).

Retrouvant pour l'occasion son vieux compère George Lucas, collectionneur comme lui des voitures du constructeur, Coppola fait de son film une peinture de l'Amérique, de ses pionniers et de la façon dont ils durent lutter avec les institutions pour imposer leurs idées novatrices. Preston Tucker est vu comme une sorte d'artiste maudit, un créateur visionnaire seul contre tous, et le film apparaît alors comme un autoportrait évident de son réalisateur, donc une œuvre profondément personnelle.




The Godfather part III (Le Parrain 3e partie), 1990
Suite et fin de la saga Corleone, avec un Michael au destin plus tragique que jamais. Ses efforts pour parvenir enfin au bout du chemin vers la rédemption ont quelque chose de bouleversant, tant on sent que l'homme est animé d'une volonté sincère. Mais son désir de protéger sa famille n'aura cessé de provoquer la perte de tout ce qu'il aimait. 

Au moment de sa sortie, cette suite ne semblait pas s'imposer, et on pouvait soupçonner Coppola de céder à la pression de la Paramount. Or, le film possède à mes yeux toutes les qualités de ses prédécesseurs, parvenant brillamment à renouveller son scénario avec l'attention portée cette fois à la génération suivante. Cette saga cinématographique est une nouvelle fois l'occasion de fabuleux numéros d'acteurs et c'est peu de dire que Pacino se montre encore impressionnant. Le parcours du personnage d'Andy Garcia, son évolution du début à la fin, est absolument passionnant, et l'acteur y déploie vraiment tout son talent, gagnant progressivement en épaisseur. 

Tourné vers la notion de transmission et d'héritage, ce troisième volet joue aussi le retour aux sources, en nous ramenant en Sicile. L'opéra qui se déroule sur scène montre bien que dans ce milieu les méthodes sont restées les mêmes, que l'Histoire se répète et qu'on n'échappe pas à son destin. Tout ça se dénoue lors d'une véritable apothéose du goût de Coppola pour le montage parallèle. Bref, par son ambiance, sa mise en scène peut-être encore plus maîtrisée que dans les deux premiers volets, The Godfather part III est un film magistral.




Dracula, 1992
Fantastique. Sa découverte à 15 ans fut un choc et le film demeurera à jamais pour moi une pierre essentielle de mon parcours cinéphile. Je me souviens parfaitement de la salle, un samedi soir à Montparnasse, de l'ambiance qui y régnait, de la place que j'occupais, des gens qui m'entouraient. Je ne me suis jamais véritablement remis du prologue, et je regardais défiler ces somptueuses images, captivé d'une façon nouvelle par le travail de la mise en scène et du montage.

S'appuyant sur les conceptions visuelles de Mignola et les trucages vintage de Roman Coppola (ces ombres qui s'avancent, ces maquettes, ses surimpressions), mais tâtant également des possibilités naissantes des effets numériques, Coppola semble retrouver la fougue et l'énergie d'un débutant. La beauté des maquillages, la majesté sombre de la musique de Kilar, la sublime photographie de Michael Ballhaus, chaque élément participe de la composition d'un monde imaginaire fascinant, que seul le cinéma est capable de concevoir. C'est du travail d’orfèvre, intelligent et visuellement jubilatoire.

Avec la volonté de revenir à la source du roman de Stoker, avec sa vision flamboyante, romantique et audacieuse (l'aspect sexuel explicite) du vampireCoppola refit de ce dernier une figure cinématographique à la mode, pour le pire comme le meilleur. C'est d'ailleurs très peu de temps après, à la faveur d'une Thema d'arte consacrée à la créature, que je découvrais le Nosferatu de Murnau


DOSSIER FRANCIS FORD COPPOLA :

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