Adossés au puissant Dreamworks, Park et Lord, les deux génies du studio Aardman, se retrouvent à travailler ensemble sur l'une de leurs productions les plus ambitieuses : un long-métrage d'animation en stop-motion. Projet risqué qui avait précédemment porté chance à Disney avec L'Étrange Noël de Mr Jack, et dans lequel ils mettent tout leur savoir-faire, quitte à manquer cependant un peu d'audace dans l'écriture, soucieux de ne pas trop perdre de vue le public. Passée l'originalité du sujet, avec ces poules en cages qui rejouent La Grande évasion et autres films de camps de prisonniers, on se retrouve en effet avec des personnages qui relèvent pour la plupart d'archétypes. On apprécie néanmoins de reconnaître la patte de Nick Park, avec notamment l'attention accordée à des héroïnes fortes et surtout ce goût pour les bricolages les plus fous.
Un spectacle qui possède indiscutablement de très bons moments, mais qui n'emporte pas pour autant pleinement l'adhésion. Reste tout de même un impressionnant tour de force, et une qualité de fabrication qui force le respect. Sans doute aussi grâce aux arguments marketings de Dreamworks, qui fait comme toujours appel à des doubleurs de prestige (Depardieu, Lemercier, Balasko pour la VF), le film connaîtra un immense succès, prolongeant ainsi pour quelques années le partenariat entre les deux studios et imposant auprès du grand-public un nouveau label.
Wallace & Gromit : the curse of the were-rabbit (Le Mystère du lapin-garou), Nick Park & Steve Box, 2005
Gromit, mon héros ! Gags, personnages, lapins (Jeannot / Hutch rules !), j'en avais la mâchoire crispée à force de conserver un sourire réjoui tout du long. Le scénario est brillant avec son jeu de fausses pistes qui fonctionnent et ces références cinématographiques qui s'enchaînent comme des dominos-cascade (Frankenstein, Quasimodo, King Kong, La Belle et la Bête, et j'en oublie).
Produisant toujours dans les locaux du studio à Bristol, Park ne renie rien de la spécificité so british de sa création, appuyant au contraire avec un malin plaisir les travers et qualités de ses compatriotes. Techniquement, c'est renversant. L'animation est non seulement fluide et expressive mais les prises de vues sont encore plus audacieuses qu'auparavant, avec des mouvements de caméra et des jeux de lumière d'autant plus remarquables quand on se dit que tout ça a été capturé en stop-motion. La poursuite souterraine en voiture, et le final sont des morceaux éblouissants, tant sur le plan du rythme que de l'inventivité. Confiée aux poulains de Hans Zimmer, la musique fait également des merveilles, constamment employée avec ironie.
Arthur Christmas (Mission : Noël), Sarah Smith, 2011
Ne vous fiez pas à ce visuel peu engageant. Dans la catégorie finalement pas si fournie des films sur le Père Noël, ce fut une bonne pioche. Ça reste certes destiné à un jeune public, mais je l'ai réellement apprécié sans non plus me forcer à retomber en enfance. Après un Souris city où Aardman tentait la 3D et qui ne rencontra pas son public, le studio anglais cesse son partenariat avec Dreamworks, et c'est désormais en coproduction avec Sony que l'aventure se poursuit, ici encore en images de synthèse. J'ai découvert le film dans sa VF (correcte), et c'est donc au générique final — sur fond d'une immonde reprise de Santa claus is coming to town — que j'ai constaté la présence d'un gros casting très british qui pourrait justifier de le revoir en VO : James McAvoy, Hugh Laurie, Bill Nighy, Michael Palin et Jim Broadbent.
Le film est une course la montre puisque se déroulant les toutes dernières heures de la nuit de Noël, avec ce que cela suppose de tension et d'accélérations, mais sans pour autant sacrifier à son discours. On va en effet assister à l'opposition entre deux façons de répondre aux questions pratiques liées au boulot du père Noël, l'une ultra-industrialisée et bluffante d'efficacité (a priori), l'autre à l'ancienne, avec ce que cela implique de nostalgie. Cette opposition est illustrée avec beaucoup de drôlerie et d'inventivité, on retrouve là-dessus les délires du studio qui mit si brillamment en scène les folles inventions de Wallace & Gromit (les amateurs y repéreront quelques amusants clins d'œil).
Les gags ne cèdent jamais non plus à la satire facile, au cynisme ou au second degré. Même le traitement des elfes est marrant, alors qu'il aurait été si facile d'en faire ce que la plupart des studios font dès lors qu'ils ont à utiliser ce genre de petits personnages rigolos et mignons démultipliés à l'écran. Et puis il y a de la poésie, le film faisant le choix plutôt bienvenu de ne pas avoir de vrai méchant, et de donner aux différents membres de la famille Noël autant de qualités (courage, générosité) que de défauts (paresse, jalousie, rancœur). Le tout n'oubliant évidemment pas de jouer la carte du merveilleux, notamment lors des scènes de vol, qui bénéficient d'une partition pour une fois vraiment inspirée et particulièrement dynamique d'Harry Gregson-Williams.
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