George A. Romero n'a pas inventé la figure cinématographique du zombie, qui est à l'origine une victime de la magie vaudou et qui inspirait déjà les expressionnistes allemands des années 1920 (le Cesare du Cabinet des Dr. Caligari, par exemple). Mais sa Nuit des morts-vivants et plus encore son prolongement Dawn of the dead en ont redéfini le sens et les motivations. L'influence du cinéaste fut donc majeure puisqu'elle a véritablement inauguré ce qui est devenu un authentique sous-genre du cinéma fantastique, qui a donné lieu — comme toujours dès qu'il est question d'une recette qu'on espère commerciale — au meilleur comme au pire. Avant d'aborder les amusants avatars hongkongais, et préférant passer sous silence ceux craspecs du bis italien, voici quelques incarnations plus ou moins avariées de cet étonnant miroir de nos âmes qu'est le zombie...
Return of the living dead (Le Retour des morts-vivants), Dan O'Bannon, 1985
La comédie horrifique est un genre particulièrement délicat qui n'affiche à son compteur que peu de réussites. Je citerai Evil dead 2, de Sam Raimi, ou Braindead, de Peter Jackson. Auteur à part entière (Dark star, Alien), Dan O'Bannon emballe un film réjouissant, drôle du début à la fin et ne souffrant d'aucune baisse de rythme. Les gags sont excellents (les zombies appelant eux-mêmes les flics pour avoir davantage de cerveaux à manger), l'interprétation (inoubliable Linnea Quigley) irrésistible, les dialogues jubilatoires (le film de Romero est évoqué à plusieurs reprises), et les maquillages réussis et inventifs. Et si la mise en scène est sans réel génie, O'Bannon livre un travail plus que digne. Quant à la fin, si son côté inattendu fait également plaisir, elle laisse quand même l'impression d'avoir été un peu expédiée, comme s'il n'y avait plus de budget pour le film et que deux ou trois stock-shots avec voix off suffirait à faire comprendre le nécessaire. Cette impression perdure jusqu'à ce générique de fin sur des images du film qui rappelle ceux des séries télé de l'époque qui reprennaient pareillement des plans figés de l'épisode qu'on venait de voir.
Aux yeux et aux oreilles du spectateur contemporain, le film a incontestablement un côté daté : le look des punks, la bande son qui mixe des morceaux des Cramps et de The Damned. Mais ça donne encore plus de saveur à ce qu'on imagine avoir été en son temps un grand succès de videoclub. Le film généra à son tour une série de suites sans vrai rapport avec le ton et l'histoire contée ici, se contentant de décliner des chiffres après le titre original.
Aux yeux et aux oreilles du spectateur contemporain, le film a incontestablement un côté daté : le look des punks, la bande son qui mixe des morceaux des Cramps et de The Damned. Mais ça donne encore plus de saveur à ce qu'on imagine avoir été en son temps un grand succès de videoclub. Le film généra à son tour une série de suites sans vrai rapport avec le ton et l'histoire contée ici, se contentant de décliner des chiffres après le titre original.
Dawn of the dead (L'Armée des morts), Zack Snyder, 2004
Les remake ont par principe mauvaise presse, et c'est pourtant encouragé par les critiques (notamment Le Monde) que j'avais eu la curiosité d'aller voir celui-ci à sa sortie. Forcément (?),
l'attente une fois nourrie a débouché sur une déception. Le film commençait pourtant sur d'excellentes bases. Une description sociale réaliste (l'hôpital, la banlieue, la vie de couple). Un casting qui évite les belles gueules de teenagers abonnés à ce genre de film depuis Scream. Le film de Romero trouvait justement une grande part de son intérêt dans l'observation et le soin accordé à la caractérisation de ses personnages. Ici, les meilleures idées tournent autour d'Andy, le voisin sur le toit, personnage complexe et vraiment intéressant. Pour son premier long métrage, Snyder signe une mise en scène intelligente, d'abord précise puis de plus en plus déstructurée, avec cette
insistance sur les écrans des vidéos de surveillance et des médias. Quelques beaux-plans d'ensemble autour du véhicule de l'héroïne, ou certains plans larges du parking extérieur du centre commercial. Bref je me disais
qu'on était là effectivement devant autre chose qu'un remake opportuniste et sans âme. Et puis...
J'ai été un peu
frustré de ne pas y trouver davantage qu'un survival pas si horror que ça, où les corps-à-corps ne sont pas très fréquents. Du coup, les
zombies ne m'ont jamais semblés être une vraie menace et assez vite, je me suis
senti loin du film. Bien qu'au-dessus du tout-venant de la
production hollywoodienne, ce Dawn of the dead 2004 manque finalement un peu d'ambition par rapport au sous-texte
politique et social qui convient pourtant si bien aux zombies et autres profanateurs de
sépultures.
The Dead, Ford brothers, 2010
Une vraie série B pour laquelle j'aurais eu du mal à
m'enthousiasmer au démarrage : scène d'ouverture aux effets démonstratifs,
interprétation de troisième zone, bande sonore sans subtilité et surtout une
mise en scène chaotique au sens de mal maîtrisée. Une grammaire qui se résume à des cadrages serrés et un montage épileptique, et qui m'a immédiatement agacé. On se désintéresse un peu trop tôt de ce qu'il se passe sur l'écran,
et en dehors du cadre assurément original de l'Afrique noire pour un zombie-flick, on se dit qu'on a déjà vu ça. Une fois
ces moments d'exposition passés, étape forcément ingrate, le film a cependant le bon goût de ne pas se donner davantage de prétention, et déroule alors un
survival plutôt convaincant et épuré de péripéties trop idiotes.
Les relations entre
les personnages sont réduites au minimum, leur parcours et motivations esquissés
sans caricature. Seule compte la façon dont ils vont progresser dans un
environnement hostile à chaque coin de dune. Le désert apparaît d'ailleurs
étonnamment peuplé et il n'y a pratiquement aucun moment où la tension pourra
se relâcher. Le protagoniste avance sans aucun espoir, tout juste préoccupé de
sa prochaine heure. Tout ça parvient à être crédible, notamment grâce à des
effets de maquillage quand même bien saisissants de réalisme. Je n'aurais donc pas été très emballé pendant le visionnage, mais c'est après coup que je me suis dit que
ça restait quand même une honnête proposition de film, jusqu'à un final qui parvient à surprendre tant tout semblait
mener à l'impasse. Dommage donc que la réalisation soit si ratée. J'aurais aimé pouvoir encourager davantage sa découverte.
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