The Ten commandments
(Les Dix commandements), Cecil B. De Mille, 1956
Un film que
l'inconscient collectif rattache à notre enfance et aux multidiffusions de fin
d'année. J'avais précédemment proposé le passage en revue d'une sélection de chouettes péplums.
De Mille avait réalisé une première version en 1923, mais il s'agissait d'un projet différent qui mélangeait scènes bibliques et contemporaines. Spectacle immense, pensé par son
réalisateur et par la Paramount comme le plus grand film jamais fait, Les
Dix commandements version '56 me réjouissent aujourd'hui comme hier. Les effets
spéciaux sont toujours aussi impressionnants, et l'emploi de l'imagerie
numérique ne rendrait pas plus belle la scène d'ouverture de la Mer Rouge. Le
soin accordé à l'ensemble de la production, du choix des décors à celui des costumes, force l'admiration à chaque plan.
Charlton Heston incarne Moïse avec
une sorte d'évidence qui fait qu'il est difficile d'imaginer un autre acteur
dans la peau de ce personnage. Dans la seconde partie du film, une fois
redescendu du Sinaï où il a reçu la révélation, ses yeux bleus et perçants ne
semblent quitter un au-delà divin, au-dessus de ce que peut embrasser le regard
des hommes. Il appose une pierre de plus à l'édifice de sa carrière, qui
comptera encore d'autres rôles prestigieux.
De même, Yul
Brynner EST Ramsès. Il porte les habits de Pharaon comme personne et sa
présence physique compose un méchant de cinéma réellement mémorable. Anne
Baxter/Nefertiri est elle aussi absolument parfaite en reine des garces
(il n'y a pas d'autre mot face à ses caprices et son machiavélisme).
À revoir le film aujourd'hui, on peut être frappé par deux aspects que l'on aurait pu légitimement négliger du temps de notre enfance. Tout d'abord la dimension politique.
De Mille a réalisé un prologue, en général absent des diffusions télévisées, où
il présente son film et explique sans ambiguïté que la parole de Dieu poussant
le peuple à se libérer des chaînes de l'esclavage est intemporelle, et que les
Pharaons d'hier sont les dictateurs d'aujourd'hui. Cette précision devait être
particulièrement éloquente pour une société qui se remettait à peine d'une
guerre mondiale généreuse en atrocités. Il ne s'agit donc pas que d'un conte
merveilleux ou d'une leçon d'histoire. La lutte pour les droits civiques est
plus que jamais d'actualité dans l'Amérique des années 50, et sous cet
éclairage le film s'enrichit énormément.
Le second aspect
concerne le travail de mise en scène qui apparaît en vérité extrêmement figé.
Les scènes ne sont quasiment pas découpées, tout juste s'autorise-t-on à
l'occasion un raccord dans l'axe. On devine que De Mille, soucieux de ne pas
dénaturer ses sources au profit du seul spectacle, impose une esthétique qui
semble directement inspirée des fresques antiques, et de la peinture
néoclassique. Sur plus de 3h30 de métrage, il nous offre un monde fantastique,
issu de la nuit des temps, et qui pourtant nous parle et n'a pas cessé de nous
fasciner.
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