J'ai eu le bonheur de découvrir le film en salle. Comme souvent, je m'en étais fait ma petite idée et croyais vraiment avoir droit pour l'essentiel à la
contemplation fascinée et fascinante de jeunes filles fraîches et
printanières, déambulant extatiques dans une campagne australienne sous filtres hamiltoniens. Or cet aspect, bien que présent, ne
constitue vraiment que la première demi-heure du récit, après un générique qui
distille déjà son charme (sourires exquis, fleurs et lettres d'amour
échangées). Tout le reste ne sera qu'inquiétude, interrogations, malaise et
terreur. Autant de moments troublants où surgissent parfois quelques précieuses trouées de
grâce, qui nous font entrevoir à nouveau le semblant de paradis qui nous avait
été offert au tout début.
Entre deux concertos de Beethoven, la musique de Bruce
Smeaton soutient merveilleusement la mise en scène de Weir qui, sur certaines
scènes, certains plans, certains raccords et surimpressions, rend palpable de
façon sublime le lien cosmique qui unit les êtres à la Nature, mais aussi les
êtres entre eux. Rien n'est dit, le mystère demeure, et pourtant ça m'a parlé.
Le neveu du colonel, Albert son domestique, sont des personnages eux-mêmes très
réussis et qui deviennent vite attachants, jamais moqués dans la
confrontation des manières qui pourraient les opposer. Et puis, sans jamais que ça apparaisse lourd ou
artificiellement plaqué, le réalisateur fait également passer une impitoyable critique de
l'institution, avec ce pensionnat qui, au fond, en surprotégeant les jeunes
filles, ne fait que les perdre, et est loin de les préparer à affronter la vie et
la société. Lorsque cette cruelle réalité se révèle, on a un peu envie de faire
comme ces pensionnaires et de s'enfuir dans le rêve.
The Last wave (La Dernière vague), 1977
Une ouverture magistrale, aux images d'une poésie forte et
incroyable. En fait, j'ai adoré le démarrage du film et cette thématique, qui
personnellement me touche beaucoup, de l'homme condamné à la passivité face au
spectacle de la Nature toute-puissante, clairement un des thèmes majeurs du cinéaste. Richard Chamberlain est vraiment
parfait, apportant beaucoup de douceur à son interprétation, ce qui rend encore
plus fascinant le parcours de son personnage. J'ai malheureusement trouvé que
sur la fin, le récit devenait un peu trop lâche, ce qui fait que je me suis un
peu détaché de l'histoire.
À côté des notations historiques sur la place des
Aborigènes dans la société australienne, l'enquête elle-même ne laissait pas
trop de doute pour le spectateur, on en devine assez vite la conclusion, et
c'est comme si Weir hésitait à aller à fond dans la brêche fantastique qu'il a
ouverte. Mais ça reste néanmoins un film assez unique, aux images souvent
marquantes (la baraque sous la tempête, brutalement envahie par l'eau et la
végétation).
Gallipoli, 1981
Fin 70's - début 80's, période charnière qui vit le cinéma australien connaître un rayonnement international. Les artisans ? George Miller et Peter Weir en premier lieu, ce dernier collaborant ici à son tour avec Mel Gibson, jeune chien fou promu nouvelle star grâce au fracassant Mad Max. Mettant en scène un drame de l'Histoire nationale, Weir fait preuve d'une ambition de dingue, visant la grande fresque mais sans jamais perdre de vue ses personnages, qu'il colle littéralement aux basques dès la fascinante ouverture qui fusionne magnifiquement les dimensions intime et épique. Il serait finalement presque dommage de catégoriser Gallipoli en film de guerre, un genre vers lequel je vais toujours à reculons, quand bien même il a son lot de réussites. Je me demande toujours ce qu'on peut bien vouloir en faire, tant sur le fond (la guerre c'est pas beau), que sur la forme (succession de lassants champs-contrechamps entre tireurs et corps qui tombent).
L'intelligence de Weir, c'est qu'il s'obstine à retarder au maximum l'échéance où il sera contraint de précipiter ses personnages dans le conflit, multipliant les épreuves auxquelles ils devront se soumettre avant de pouvoir l'atteindre. Il nous laisse ainsi le temps de nous familiariser avec eux, de capter encore un peu ces derniers feux de l'innocence d'une jeunesse qui va découvrir trop tard qu'elle est promise au sacrifice. Le film baigne dans une lumière solaire, sous laquelle s'animent des corps pleins de vitalité et des visages pleins de fraîcheur juvénile (le sourire incroyablement touchant de Mark Lee). Notamment grâce à son sens du paysage et à son utilisation de la musique, le regard du cinéaste offre un saisissant mélange de poésie et de réalisme, avec des scènes tantôt grouillantes de vie (le championnat de course à pied, les souks du Caire), tantôt en apesanteur (la traversée du lac, ce personnages au regard captivé par les pyramides, cette scène sous-marine où l'on défie la mort), et qui parviennent encore à dire beaucoup de chose sur la société australienne, son rapport aux Britishs. Et lorsqu'il n'est plus possible de reculer, les personnages se retrouveront littéralement plongés au cœur du champ de bataille, puisque même leur camp sur la plage n'est aucunement à l'abri des bombardements et des snipers. Vient alors le temps du massacre, à peine suspendu par une course vaine contre la mort. Gallipoli n'est finalement même pas le nom d'une bataille mais d'un canardage en règle, symbole ultime de l'absurdité de la guerre. Splendide chef-d'œuvre.
Gallipoli, 1981
Fin 70's - début 80's, période charnière qui vit le cinéma australien connaître un rayonnement international. Les artisans ? George Miller et Peter Weir en premier lieu, ce dernier collaborant ici à son tour avec Mel Gibson, jeune chien fou promu nouvelle star grâce au fracassant Mad Max. Mettant en scène un drame de l'Histoire nationale, Weir fait preuve d'une ambition de dingue, visant la grande fresque mais sans jamais perdre de vue ses personnages, qu'il colle littéralement aux basques dès la fascinante ouverture qui fusionne magnifiquement les dimensions intime et épique. Il serait finalement presque dommage de catégoriser Gallipoli en film de guerre, un genre vers lequel je vais toujours à reculons, quand bien même il a son lot de réussites. Je me demande toujours ce qu'on peut bien vouloir en faire, tant sur le fond (la guerre c'est pas beau), que sur la forme (succession de lassants champs-contrechamps entre tireurs et corps qui tombent).
L'intelligence de Weir, c'est qu'il s'obstine à retarder au maximum l'échéance où il sera contraint de précipiter ses personnages dans le conflit, multipliant les épreuves auxquelles ils devront se soumettre avant de pouvoir l'atteindre. Il nous laisse ainsi le temps de nous familiariser avec eux, de capter encore un peu ces derniers feux de l'innocence d'une jeunesse qui va découvrir trop tard qu'elle est promise au sacrifice. Le film baigne dans une lumière solaire, sous laquelle s'animent des corps pleins de vitalité et des visages pleins de fraîcheur juvénile (le sourire incroyablement touchant de Mark Lee). Notamment grâce à son sens du paysage et à son utilisation de la musique, le regard du cinéaste offre un saisissant mélange de poésie et de réalisme, avec des scènes tantôt grouillantes de vie (le championnat de course à pied, les souks du Caire), tantôt en apesanteur (la traversée du lac, ce personnages au regard captivé par les pyramides, cette scène sous-marine où l'on défie la mort), et qui parviennent encore à dire beaucoup de chose sur la société australienne, son rapport aux Britishs. Et lorsqu'il n'est plus possible de reculer, les personnages se retrouveront littéralement plongés au cœur du champ de bataille, puisque même leur camp sur la plage n'est aucunement à l'abri des bombardements et des snipers. Vient alors le temps du massacre, à peine suspendu par une course vaine contre la mort. Gallipoli n'est finalement même pas le nom d'une bataille mais d'un canardage en règle, symbole ultime de l'absurdité de la guerre. Splendide chef-d'œuvre.
DOSSIER PETER WEIR :
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