The Fox and the hound (Rox et Rouky), Ted Berman, Richard Rich, Art Stevens, 1981
Porté par une histoire excessivement simple, Rox et Rouky table comme pas mal de productions Disney à venir sur la question du droit à la différence. Le film est étonnamment équilibré dans sa construction, ne perdant pas de temps à présenter ses personnages et leur environnement. La forêt paraît un peu nue, on ne voyage pas trop, à l'image d'un récit relativement épuré, se limitant à faire vivre une poignée de personnages perdus dans un paysage qui les domine. La sobriété exemplaire de l'ouverture apparaît comme un hommage évident à Bambi, une œuvre référence pour de nombreux animateurs. Sans fanfare, c'est tout simplement l'éveil de la Nature qui nous est présenté. Les artistes ont manifestement eu à cœur de restituer les formes, couleurs et lumière de la forêt, ce faux calme qui révèle brusquement qu'un drame est en cours. Car ici encore, l'harmonie va être troublée par la présence humaine qui détruit ou cherche à conditionner, à maîtriser des instincts qui ne peuvent pas l'être, au premier rang desquels l'amour et l'amitié.
Le film est drôle sans être lourd, le burlesque se résumant aux scènes avec la chenille, finalement peu envahissantes. C'est surtout plein de tendresse, et même les méchants sont motivés par des raisons qu'on peut comprendre. Comme dans Bambi, c'est le rythme des saisons qui va rythmer le récit. Le temps va passer, et les personnages grandir, mais les enseignements qu'ils retireront de leurs expériences paraissent beaucoup plus profonds que la séquence équivalente du Roi lion — "Hakuna matata !" — nous abandonnant avec le sentiment d'un futur encore incertain (et plutôt que d'explorer cette voie, Rox et Rouky 2 préférera revenir aux jeux inconséquents de l'enfance). La musique est bien présente, et on a droit à une jolie chansonnette, mais aucun personnage ne s'arrêtera pour la fredonner. Il y a des scènes très fortes, voire poignantes, et le climax face au grizzly reste un souvenir d'enfance qui ne démérite pas.
La volonté de réalisme se réclame ci encore de l'héritage Bambi. On sent une vraie volonté de restituer l'anatomie et le mouvement des animaux avec le plus d'authenticité possible, tout en glissant ce qu'il faut d'anthropomorphisme pour exprimer toute la richesse de leurs émotions. L'animation des humains est elle-même pleine de délicatesse, et souvent étonnante de justesse. Historiquement, c'est une production intéressante également car ce sont un peu les anciens qui ont connu le vieux Walt Disney qui ont travaillé ici, et se sont efforcés d'accompagner et de mettre sur les rails leurs jeunes successeurs. Rox et Rouky est donc un peu leur master class. Don Bluth livrera ici son dernier travail avant de quitter Disney pour fonder son propre studio en compagnie de Gary Goldman, et on reconnaît bien sa patte précisément dans l'animation des humains, tandis qu'on trouve déjà au générique les grands noms du Disney à venir (Tim Burton fréquentait déjà le studio à cette époque, mais préférait se planquer dans le placard de son bureau).
The Black cauldron (Taram et le chaudron magique), Ted Berman, Richard Rich, 1985
Porté par une histoire excessivement simple, Rox et Rouky table comme pas mal de productions Disney à venir sur la question du droit à la différence. Le film est étonnamment équilibré dans sa construction, ne perdant pas de temps à présenter ses personnages et leur environnement. La forêt paraît un peu nue, on ne voyage pas trop, à l'image d'un récit relativement épuré, se limitant à faire vivre une poignée de personnages perdus dans un paysage qui les domine. La sobriété exemplaire de l'ouverture apparaît comme un hommage évident à Bambi, une œuvre référence pour de nombreux animateurs. Sans fanfare, c'est tout simplement l'éveil de la Nature qui nous est présenté. Les artistes ont manifestement eu à cœur de restituer les formes, couleurs et lumière de la forêt, ce faux calme qui révèle brusquement qu'un drame est en cours. Car ici encore, l'harmonie va être troublée par la présence humaine qui détruit ou cherche à conditionner, à maîtriser des instincts qui ne peuvent pas l'être, au premier rang desquels l'amour et l'amitié.
Le film est drôle sans être lourd, le burlesque se résumant aux scènes avec la chenille, finalement peu envahissantes. C'est surtout plein de tendresse, et même les méchants sont motivés par des raisons qu'on peut comprendre. Comme dans Bambi, c'est le rythme des saisons qui va rythmer le récit. Le temps va passer, et les personnages grandir, mais les enseignements qu'ils retireront de leurs expériences paraissent beaucoup plus profonds que la séquence équivalente du Roi lion — "Hakuna matata !" — nous abandonnant avec le sentiment d'un futur encore incertain (et plutôt que d'explorer cette voie, Rox et Rouky 2 préférera revenir aux jeux inconséquents de l'enfance). La musique est bien présente, et on a droit à une jolie chansonnette, mais aucun personnage ne s'arrêtera pour la fredonner. Il y a des scènes très fortes, voire poignantes, et le climax face au grizzly reste un souvenir d'enfance qui ne démérite pas.
La volonté de réalisme se réclame ci encore de l'héritage Bambi. On sent une vraie volonté de restituer l'anatomie et le mouvement des animaux avec le plus d'authenticité possible, tout en glissant ce qu'il faut d'anthropomorphisme pour exprimer toute la richesse de leurs émotions. L'animation des humains est elle-même pleine de délicatesse, et souvent étonnante de justesse. Historiquement, c'est une production intéressante également car ce sont un peu les anciens qui ont connu le vieux Walt Disney qui ont travaillé ici, et se sont efforcés d'accompagner et de mettre sur les rails leurs jeunes successeurs. Rox et Rouky est donc un peu leur master class. Don Bluth livrera ici son dernier travail avant de quitter Disney pour fonder son propre studio en compagnie de Gary Goldman, et on reconnaît bien sa patte précisément dans l'animation des humains, tandis qu'on trouve déjà au générique les grands noms du Disney à venir (Tim Burton fréquentait déjà le studio à cette époque, mais préférait se planquer dans le placard de son bureau).
The Black cauldron (Taram et le chaudron magique), Ted Berman, Richard Rich, 1985
Un film qui a durablement hanté mon imaginaire enfantin (...comme la chanson de Douchka). S'il est
toujours plaisant de se confronter aujourd'hui à l'art quasi révolu de l'animation sur
celluloïd, j'ai cependant eu du mal à être dupe de la maigreur du scénario proposé ici. Et
c'est toujours effarant de voir le nombre de coscénaristes crédités pour un
résultat aussi peu abouti. C'est d'autant plus inexcusable que la production de ce long-métrage s'est étalée sur une dizaine d'années. Alors que la tradition disneyienne donnait jusqu'alors plutôt dans le conte de fée, le studio tente ici le registre de la fantasy telle qu'on pouvait la jouer à la même époque avec Donjons & dragons.
Passons sur le concept peu convaincant du Seigneur des ténèbres réduit à courir après un petit cochon aux cils soyeux pour retrouver sa puissance. Passons sur le caractère franchement agaçant du héros Taram (Taran en VO) qui se rêve chevalier et qui n'accomplira aucune action véritablement héroïque de tout le film, ses seuls faits d'arme étant l'œuvre de son épée magique. Passons sur le personnage de la princesse toute pimpante et guillerette alors qu'elle traverse un donjon qui pue la mort et la torture... Bin, il ne reste malheureusement plus grand chose à se mettre sous la dent.
Passons sur le concept peu convaincant du Seigneur des ténèbres réduit à courir après un petit cochon aux cils soyeux pour retrouver sa puissance. Passons sur le caractère franchement agaçant du héros Taram (Taran en VO) qui se rêve chevalier et qui n'accomplira aucune action véritablement héroïque de tout le film, ses seuls faits d'arme étant l'œuvre de son épée magique. Passons sur le personnage de la princesse toute pimpante et guillerette alors qu'elle traverse un donjon qui pue la mort et la torture... Bin, il ne reste malheureusement plus grand chose à se mettre sous la dent.
Le problème du film, c'est qu'il ne propose aucun choix tranché, plongeant dans une atmosphère plutôt sombre des personnages qui
perdent trop vite leur sérieux. Même la musique pourtant très soignée
d'Elmer Bernstein ne m'a pas semblé transcender son caractère illustratif (le film étant un
des rares Disney sans chansons), alors que c'était l'occasion d'une composition épique. C'est d'autant plus dommage, que visuellement The Black cauldron a de quoi impressionner, cadré dans un cinemascope que les studios n'avaient pas exploité depuis Sleeping beauty. Je retiendrai surtout le design du Seigneur des ténèbres,
quelques effets de travellings étonnants pour suivre le vol des dragons,
l'animation sans faille de la princesse et surtout, le personnage de Gurki,
formidable trouvaille animée avec un talent fou par ce génie d'Andreas Deja (animateur de Roger Rabbit, Jaffar, Scar ou encore Lilo). Achevé au moment où la nouvelle direction du studio se mettait en place, le film horrifia ses nouveaux dirigeants. Quelques plans finalisés jugés trop gores ou
trop violents furent coupés juste avant la sortie, sans pour autant l'empêcher d'être un désastre commercial. Je rêve d'une édition collector qui
proposerait alors la version d'origine, inédite. Disney l'a bien fait pour Le Roi lion et La Belle et la Bête...
The Great mouse
detective (Basil détective privé), Ron Clements, John Musker, Burny Mattinson, David
Michener, 1986
Découvert à sa sortie en salle, je craignais un peu de le
revoir, estimant qu'on était là dans le creux de l'inspiration des productions
Disney. Basil appartient en effet à cette période mal aimée du studio californien, qui enchaînait gros bides (Taram) et films peu ambitieux même si plaisants, comme Bernard et Bianca ou Oliver & company. Quelle ne fut
pas ma joie en le revoyant de constater au contraire que le
savoir-faire de la maison est ici au sommet. Car Basil est LE film de la relève : la nouvelle génération d'animateurs et scénaristes a enfin les rênes du projet, et est désormais sommée de montrer ce qu'elle sait faire. Du côté des auteurs, on notera que Clements et Musker poursuivront leur association en réalisant par la suite des titres fameux de la firme aux grandes oreilles : La Petite sirène, Aladdin, Hercule, La Planète au trésor, tandis que Burny Mattinson participera au scénario de La Belle et la Bête, Le Roi lion, Pocahontas et Mulan. Parmi les animateurs, d'autres talents : l'indispensable Andreas Deja, Rob Minkoff (réalisateur du Roi lion) ou encore Kirk Wise (réalisateur de La Belle et la Bête et du Bossu de Notre-Dame). En gros, il s'agit d'une promotion prestigieuse, qui va être directement responsable du renouveau du studio au début des années 90. Par son ton, comme par sa technique, The Great mouse detective exhale une vraie fraîcheur, et réjouit par ses prises de risques.
Inspiré de contes pour enfants dont le protagoniste est une
souris détective, le film revisite avec drôlerie l'univers de Conan Doyle et de son héros aux
déductions suprêmes, prônant la supériorité de l'intelligence sur la force
brute. On se régale de voir le cerveau de Basil en action, décryptant de façon
aberrante les indices les plus abscons. L'atmosphère anglaise est vraiment bien
rendue, avec sa brume londonienne et ses coins louches peuplés de gueules
patibulaires. Le film se déroule d'ailleurs intégralement de nuit. De même les
accents tantôt distingués (le so british
Dawson, ou l'écossais Flaversham), tantôt populos (les marins) ajoutent à la
solidité de ce petit monde. Le générique indique que c'est la voix de Basil Rathbone qu'on entend lors d'une
brève scène où Sherlock Holmes et Watson discutent en ombres chinoises. On
devine dès lors à qui le héros doit son nom.
Le design des personnages est vraiment réussi, le studio ayant évidemment depuis longtemps l'habitude de mettre en scène des souris. La petite
Olivia est vite attachante sans être mièvre, tandis que le héros en titre a une classe
incroyable. Face à lui s'impose son ennemi juré Ratigan, un rat aux allures aristocratiques qui s'efforce de conserver son flegme en espérant ainsi passer pour une souris. Et tout le monde a intérêt à jouer le dupe au risque de se
faire boulotter par Felicia, une chatte domestiquée. Renouant enfin avec la grande tradition du méchant de Disney, ce personnage est une vraie réussite. La silhouette, larges
épaules mais jambes minuscules, est franchement superbe et c'est un plaisir
pour les yeux que de le voir prendre toute une série de poses grotesques. C'est
Vincent Price qui lui donne sa voix en VO et son interprétation cabotine est en
ce sens vraiment jubilatoire. Le film est timide en chansons et bénéficie d'un très chouette score d'Henri Mancini.
L'affrontement final entre les deux rivaux est quant à lui un petit bijou d'animation, démarrant par une poursuite en ballon dans le ciel nocturne de Londres avant de finir en bagarre apocalyptique au sommet de Big Ben. Les rouages mécaniques sont représentés en images de synthèse, peut-être une première pour le studio, ce qui permet des mouvements de caméra assez spectaculaires, où les personnages sur cellulo sont très bien intégrés. Lorsque Ratigan laisse enfin exploser sa rage et redevient rat, yeux exorbités, toutes griffes dehors, il est carrément terrifiant. Bref, animation remarquable jusque dans ses petits détails, pas de tiédeur dans les gags (un sbire de Ratigan se fait bouffer par Felicia, Fidget la chauve-souris et ses apparitions bouh-fais-moi-peur, le numéro assez sexy de la chanteuse de cabaret), un rythme enlevé sans être expéditif, autant d'éléments qui font que Basil détective privé demeure un spectacle toujours appréciable aujourd'hui, en dehors des seules considérations nostalgiques.
L'affrontement final entre les deux rivaux est quant à lui un petit bijou d'animation, démarrant par une poursuite en ballon dans le ciel nocturne de Londres avant de finir en bagarre apocalyptique au sommet de Big Ben. Les rouages mécaniques sont représentés en images de synthèse, peut-être une première pour le studio, ce qui permet des mouvements de caméra assez spectaculaires, où les personnages sur cellulo sont très bien intégrés. Lorsque Ratigan laisse enfin exploser sa rage et redevient rat, yeux exorbités, toutes griffes dehors, il est carrément terrifiant. Bref, animation remarquable jusque dans ses petits détails, pas de tiédeur dans les gags (un sbire de Ratigan se fait bouffer par Felicia, Fidget la chauve-souris et ses apparitions bouh-fais-moi-peur, le numéro assez sexy de la chanteuse de cabaret), un rythme enlevé sans être expéditif, autant d'éléments qui font que Basil détective privé demeure un spectacle toujours appréciable aujourd'hui, en dehors des seules considérations nostalgiques.
The Little mermaid (La Petite sirène), 1989
Maintenant que le studio a mis en place cette nouvelle génération d'artistes, il lui reste à ressusciter la pseudo-magie Disney. Cette résurrection va prendre logiquement la forme d'un retour aux sources. Fini les sujets contemporains, on repart sur la tradition du conte de fée. Comme souvent malheureusement, le film va se contenter d'exploiter le concept de base du conte, en prenant bien soin d'amputer la morale particulièrement sombre et édifiante du récit d'Andersen. Le scénario aboutit alors à une sorte de conte initiatique plutôt correctement raconté, mais qui ne m'a pas captivé plus que ça, même si j'apprécie une certaine recherche de complexité dans les relations entre les personnages, et une vraie ambition dans la mise en scène, riche en mouvements.
En ce qui me concerne, l'intérêt premier du film c'est qu'il a été imaginé et conçu avant tout comme une comédie musicale, où les chansons ont été pensées et composées en même temps que le scénario, et non plus comme des pièces rapportées. À ce titre, La Petite sirène représente une date majeure puisqu'elle va placer sur le devant de la scène le talent du compositeur Alan Menken, prodige de Broadway dont l'œuvre va littéralement faire corps avec la plupart des films à venir du studio, constituant donc un apport capital. Écrites ici par son complice Howard Ashman, ses chansons prolongent directement la dramaturgie du film, et impressionnent par la richesse et la variété de leurs orchestrations. J'aime particulièrement Part of your world.
Après une décennie plutôt tiède en réussites commerciales, le succès du film sera inespéré, permettant de rebraquer les projecteurs et l'intérêt sur un studio qui menaçait sérieusement de perdre de son prestige. On l'a sans doute oublié, mais à cette époque Disney envisageait plus que sérieusement de fermer son département animation, jugé insuffisamment rentable ! The Little mermaid va donc logiquement imposer une nouvelle méthode de production, avec des sorties plus fréquentes, quitte à tenter de reproduire une formule : introduction chantée où l'héroïne interroge son destin (Ariel, Belle, Mulan), petits compagnons comiques (Sebastian, Abu, Meeko, Mushu), méchants grotesques (Ursula, Jafar, Hadès), et chansons calibrées pour les Oscars.
En ce qui me concerne, l'intérêt premier du film c'est qu'il a été imaginé et conçu avant tout comme une comédie musicale, où les chansons ont été pensées et composées en même temps que le scénario, et non plus comme des pièces rapportées. À ce titre, La Petite sirène représente une date majeure puisqu'elle va placer sur le devant de la scène le talent du compositeur Alan Menken, prodige de Broadway dont l'œuvre va littéralement faire corps avec la plupart des films à venir du studio, constituant donc un apport capital. Écrites ici par son complice Howard Ashman, ses chansons prolongent directement la dramaturgie du film, et impressionnent par la richesse et la variété de leurs orchestrations. J'aime particulièrement Part of your world.
Après une décennie plutôt tiède en réussites commerciales, le succès du film sera inespéré, permettant de rebraquer les projecteurs et l'intérêt sur un studio qui menaçait sérieusement de perdre de son prestige. On l'a sans doute oublié, mais à cette époque Disney envisageait plus que sérieusement de fermer son département animation, jugé insuffisamment rentable ! The Little mermaid va donc logiquement imposer une nouvelle méthode de production, avec des sorties plus fréquentes, quitte à tenter de reproduire une formule : introduction chantée où l'héroïne interroge son destin (Ariel, Belle, Mulan), petits compagnons comiques (Sebastian, Abu, Meeko, Mushu), méchants grotesques (Ursula, Jafar, Hadès), et chansons calibrées pour les Oscars.
DOSSIER WALT DISNEY PICTURES :
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