1 mai 2018

Sammo Hung : deux films

Prodigal son, 1981
Encore un étonnant mélange des genres réalisé par l'iconoclaste Sammo Hung. Maîtrisant parfaitement chacune de ces traditions, sans pour autant prétendre jouer le gardien de chapelle, il s'amuse ici à mêler opéra, comédie hongkongaise (tendance touche-pipi), récit d'apprentissage et parcours de vengeance, avec d'incessantes ruptures de ton et d'ambiance. Certaines séquences surprennent par leur soudaine noirceur, de même que ces irruptions de violence parées de choquants effets sanglants. Le spectateur a ainsi l'impression d'avoir plusieurs films emboîtés les uns dans les autres, et mieux vaut pour lui avoir l'esprit ouvert, la jubilation n'en sera que plus intense.

On se régale du charisme de Yuen Biao en tête d'affiche et de la prestance impeccable de Lam Ching-Ying (à jamais Mr. Vampire). Sammo Hung compose quant à lui un irrésistible maître de kung-fu qui s'essaie à la calligraphie et nous fait son petit festival ahurissant en milieu de film. Ultime preuve de la gourmandise du cinéaste ici à l'œuvre, on a en plus droit à des ninjas effectuant d'éblouissantes chorégraphies (et c'est toujours bien d'avoir des ninjas dans un film). Bref, du très bon spectacle.




Blade of fury, 1993
Rien de moins qu'un chef-d'œuvre, admirable de bout en bout, témoin rétrospectif d'un certain âge d'or du cinéma de Hong Kong. Blade of fury s'appuie sur un scénario complexe en forme de tragédie sur l'amitié et la politique, avec d'inattendues et étonnamment bien intégrées touches de poésie, essentiellement portées par la troublante présence de Rosamund KwanThématiquement le film est vraiment riche, on n'est pas du tout dans de la production studio de série pondant du divertissement à la chaîne. Le ton est vraiment désespéré, voire nihiliste. Il y est question de la volonté de faire aboutir de nécessaires réformes politiques, d'espoir en un avenir meilleur pour la Chine, mais tout cela contrebalancé par une lucidité qui va conduire à l'acceptation du sacrifice de soi, donnant lieu à quelques scènes vraiment poignantes.

Car si cela ne suffisait pas, l'émotion est en plus bien là, grâce au lyrisme constant de la réalisation. Dans sa mise en scène, Sammo donne un peu l'impression d'être en mode « après moi le déluge. » Les scènes d'action sont d'une rage et d'une violence véritablement époustouflantes, annonçant un peu la fièvre qui animera bientôt Tsui Hark sur son The Blade deux ans plus tard. Toutes les techniques semblent poussées jusqu'à la limite de l'acceptable (câbles, trampolines, charcutages gores, corps à corps et combats armés). Enfin, la sauvagerie de l'action se voit sublimée par le raffinement poussé des costumes et des décors, et le spectacle bénéficie en plus d'un casting de très haute volée composé d'excellentissimes artistes martiaux (Ti LungCynthia KhanYeung Fan). Tout ces ingrédients aboutissent à un grand spectacle jouissif et d'une inventivité fantastique.

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