27 novembre 2017

Le Cinéma de Richard Donner I. 1961-1978

X-15, 1961
Après avoir fait ses armes à la télévision américaine (The Twilight zone, Au nom de la loi, The Man from U.N.C.L.E., Les Mystères de l'Ouest notamment), Richard Donner réalise une poignée de films sans grand succès au cours des années 60. Tout d'abord ce X-15, un docu-fiction sponsorisé par la NASA mettant en scène les exploits de l'avion-fusée X-15, avec Charles Bronson en pilote d'essai et James Stewart en narrateur. Projet bizarre, le film connut une distribution internationale, mais passa néanmoins inaperçu.

Il faudra attendre 1968 pour que Donner réalise son premier "vrai" film de cinéma : Salt & Pepper (Sel, poivre et dynamite), véhicule mettant en vedette Sammy Davis Jr. et son pote du Rat pack, Peter Lawford, qui dut être suffisamment populaire pour justifier d'une suite deux ans plus tard, réalisée cette fois par Jerry Lewis (One more time). Puis ce sera Twinky (L'Ange et le démon), en 1970, une comédie dramatique tournée entre Londres et New York où il retrouve Bronson, et qui ressemble déjà plus à un projet personnel. Film hélas sans grand succès qui contraint Donner à retourner travailler pour la télévision (Les Rues de San Francisco, Kojak), jusqu'à ce qu'enfin il tombe sur un sujet qui lui apparaît comme la chance de sa vie, une opportunité à ne pas rater.




The Omen (La Malédiction), 1976
Enfin découvert ce titre, considéré comme emblématique d'une époque où le cinéma fantastique se plaisait à créer du malaise psychologique avec des marmots, de Rosemary's baby à The Shining, en passant par Audrey Rose. Donner et ses producteurs se retrouvent ici évidemment en quête de la formule à succès de The Exorcist, et leur sujet est plutôt bien trouvé, mais le résultat est loin d'arriver à la cheville du Friedkin. Ça démarrait plutôt bien, le film se montrant remarquablement inventif dans sa mise en scène, ses cadrages, son éclairage et son montage, qui témoignent d'un vrai appétit du cinéaste, d'une volonté de dépasser le cadre bas de gamme de la série B, auquel son budget pouvait le contraindre. Donner opte donc pour une approche plutôt réaliste, se montrant relativement avare en effets chocs et scènes ouvertement fantastiques, pour mieux leur donner un impact maximal au moment où elles surgissent, et en faire des petits morceaux de bravoure d'autant plus grandiloquents et fascinants qu'ils sont portés par une musique hors-norme (et oscarisée) de Jerry Goldsmith, en mode chants grégoriens inversés. Le problème est que ce qu'il raconte ne m'a pas vraiment passionné. La faute en grande partie à un scénario qui fait bientôt le choix de se focaliser sur la minutieuse — mais tellement pleine de trous qu'elle en deviendrait nanarde — enquête autour du monde de papa Peck et de son copain David Warner (très bon) pour aboutir à une conclusion qui ne faisait aucun doute aux yeux du spectateur. Même le moment où Peck doute est vite évacué.

On passe du coup complètement à côté de ce qui me semblait pourtant être le vrai sujet. Sur le papier, The Omen avait tout pour donner un drame déchirant, avec cette idée du mal absolu incarné au cœur de la cellule familiale, dans le corps par nature aimable et innocent d'un enfant, avec par dessus ça l'idée brillante de situer l'intrigue dans le milieu politique. Malheureusement, le film échoue totalement à susciter le moindre trouble, le moindre vertige, notamment à cause de l'interprétation fadasse de la mère par Lee Remick, personnage sans relief, à la platitude des dialogues amoureux du couple, et à un gamin qui joue mal (ou est très mal dirigé, donnant presque l'impression de plans volés), et qui n'a donc aucune présence à l'écran. Même le climax, qui n'est tout de même rien d'autre qu'une scène d'infanticide, est impitoyablement escamoté (mais je crois que Donner n'a pas eu les coudées franches sur ce final). Évidemment, ça aurait été un autre film — et j'ignore si le remake de 2006 exploite mieux cette veine — mais par conséquent, je n'ai guère été emballé par un récit sur lequel le spectateur a trois longueurs d'avance sur les personnages. J'en retiens des bouts de scène, isolément, morceaux brillants (la mort du prêtre, la fouille du cimetière italien, la composition fantastique de la gouvernante). Le plus désolant est que le passage qui m'aura finalement le plus intéressé aura été le tout dernier plan, me donnant presque envie de m'intéresser aux suites réputées médiocres.






Superman the movie, 1978
Chronique précédemment publiée dans ma retrospective Superman au cinéma...



















Superman II, 1978
Alors qu'il le tournait en parallèle du premier volet, Donner se vit dépossédé du projet par ses producteurs. Et c'est le britannique Richard Lester qui reprit, réorienta et acheva ce Superman II tel qu'il sortit sur les écrans et qu'on l'a vu pendant des années. Trente ans plus tard, la Warner offrit à Donner l'opportunité de revenir sur la matière déjà en boîte et de présenter sa version du film, qui s'affirme plus que jamais pensé dans la continuité du premier volet, tant sur le plan de la narration, que du ton. Bien que dissimulant mal son côté un peu bricolée (en reconstituant par exemple des scènes perdues à partir de répétitions filmées, et en conservant quand même des plans tournés par Lester), cette Donner's cut ne manque pas d'intérêt, et c'est quand même assez fabuleux qu'elle ait eu droit à sa résurrection.


Elle permet surtout de constater à quel point l'autre Richard avait de son côté réussi à marquer le film de son empreinte, pour le meilleur ou pour le pire, avant de pouvoir pleinement lâcher son goût pour le burlesque dans le troisième volet. Dans un cas comme dans l'autre, j'avoue que ça reste un film qui ne m'a jamais vraiment passionné, un peu trop en mode remake paresseux et dispensable, n'ajoutant que peu de développements au premier film qui avait déjà tout dit.


DOSSIER RICHARD DONNER :

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